Le Grenelle de l’environnement, organisé en France en 2007 afin de prendre des décisions de long terme favorisant le développement durable, a fixé des objectifs très ambitieux en matière de réduction d'émissions de gaz à effet de serre.
En effet, la France doit, en 2050, avoir divisé ces derniers par quatre par rapport au niveau de 1990.
Cette ambition a été réaffirmée avec la signature de l’Accord de Paris en 2015 et la création de la loi énergie-climat selon laquelle nous devrions atteindre la neutralité carbone en 2050.
Or, selon le Ministère de la Transition Écologique, "le secteur du bâtiment représente 44% de la consommation d’énergie et près de 25% des émissions de CO2”. Il s’agit même du secteur économique le plus consommateur en énergie du pays.
C’est pourquoi le gouvernement souhaite que :
La phase de construction est particulièrement importante pour cela puisque selon la ministre de la Transition Énergétique Barbara Pompili, elle est responsable d’entre 60% et 90% de l’impact carbone du bâtiment.
Au vu de ce second souhait, la réglementation thermique RT2012 a été mise en place le 1er janvier 2013, et son successeur, la réglementation environnementale RE2020 le sera dès le début de l’année 2022.
Dans l’esprit des réglementations RT2012 et RE2020, d’autres mesures ont été prises afin de limiter l’empreinte carbone des bâtiments :
Bon à savoir
Le label BBC ou Basse Performance Énergétique est la garantie d’une haute performance énergétique avec par exemple : l’utilisation d’énergies renouvelables, une bonne isolation, une orientation au soleil adaptée, ainsi qu’une ventilation et une étanchéité à l’air performantes.
Le label E+/C- ou Énergie plus Carbone moins est un label expérimental réservé aux bâtiments non résidentiels et qui a servi à calibrer les exigences énergétiques et environnementales des futures réglementations.
Avec ces réglementations, le gouvernement espère réduire l’empreinte carbone de la construction des bâtiments de plus de 30% d’ici 10 ans.
La réglementation thermique RT2012 encadre les constructions neuves et a pour but de permettre aux propriétaires des bâtiments de faire des économies d’énergie tout en limitant leur impact sur l’environnement.
Elle a succédé aux réglementations thermiques précédentes, dont la première, qui date de 1974, avait été mise en place en réponse au choc pétrolier de 1973. Elles semblent jusqu’ici avoir été efficaces puisque lorsque la RT2012 est entrée en application en 2013, la consommation énergétique des constructions neuves était deux fois moindre qu’en 1974.
Alors que la réglementation énergétique RE2020 devait initialement entrer en vigueur le 1er janvier 2021, la crise du covid et les acteurs de la construction qui vont être impactés ont poussé le gouvernement à retarder sa mise en place, qui ne sera finalement effective qu’au 1er janvier 2022.
En attendant cette date, c’est la réglementation RT2012 qui fait foi. Mais en quoi consiste-t-elle exactement ?
Concrètement, le prédécesseur de la RE2020 avait mis en place des exigences de moyens et de résultats concernant le confort et la consommation d’énergie des bâtiments construits.
Premièrement, depuis 2013, la consommation d’énergie primaire par mètre carré et par an d’un logement est limitée.
La quantité d’énergie primaire, que l’on voit souvent exprimée en kWhEP (kilowattheure d’énergie primaire) est différente de la quantité d’énergie finale, qui est elle exprimée en kWhEF (kilowattheure d’énergie finale).
En effet, L’énergie finale est l’énergie réellement disponible pour les utilisateurs, alors que l’énergie primaire est l’énergie qui a été consommée afin de produire l’énergie finale.
Cette dernière prend en compte les pertes liées au transport de l’énergie, à sa production, etc. Elle a ainsi une valeur plus élevée que l’énergie finale.
Pour avoir une idée de la différence entre ces deux valeurs pour votre logement, les coefficients de conversion utilisés sont les suivants :
Pour permettre une évaluation quantitative et objective, le prédécesseur de la RE2020 exigeait que la consommation d’énergie primaire du chauffage, de l’eau sanitaire, de l’éclairage de la climatisation et des autres systèmes consommateurs d’un bien, moins sa production d’énergie photovoltaïque, soit en-deçà de son coefficient Cepmax.
Le Cepmax est de 50 kWhEP par mètre carré et par an, mais est ajusté en fonction de la localisation du bien, de son altitude, de sa surface, de ses émissions de gaz à effet de serre et de son type (ces ajustements sont réalisés respectivement avec le calcul des coefficients Mcgéo, Mcalt, Mcsurf, McGES et Mctype). Son calcul est ainsi :
Cepmax = 50 x Mctype x (Mcgéo + Mcalt + Mcsurf + McGES)
Deuxièmement, le prédécesseur de la RE2020 obligeait les constructeurs de bâtiments à tirer profit de l’environnement de bien afin d’en réduire les besoins en énergie. Cela implique notamment de tenir compte de l’orientation au soleil et au vent afin de réduire les contraintes et d’en exploiter les opportunités qui y sont liées.
On appelle efficacité énergétique d’un bâtiment sa capacité à tirer profit de son environnement afin de limiter ses besoins en énergie.
L’efficacité énergétique d’un bâtiment est décrite avec un indicateur appelé le coefficient “besoins énergétiques du bâti” ou Bbio. Les besoins énergétiques du bâti sont indépendants des systèmes énergétiques mis en place au sein du bâtiment et ne sont liés qu’à la conception et à la construction de celui-ci.
Comme dans le cas du Cep qui doit être en-dessous du coefficient cepmax dans le cas de la consommation en énergie primaire, le coefficient Bbio doit être inférieur au Bbiomax.
Le coefficient Bbiomax moyen du bâtiment est entre 40 et 140 en fonction de la nature du bâtiment et de l’usage auquel il est destiné. Il est ensuite, lui aussi, ajusté en fonction de la localisation géographique du bien, de son altitude, et de sa surface ou de la surface de ses parties en fonction de sa nature (les ajustements sont réalisés respectivement avec le calcul des coefficients Mbgéo, Mbalt et Mbsurf). Son calcul est ainsi :
Bbiomax = Bbiomaxmoyen x (Mbgéo + Mbalt + Mbsurf)
Afin de se conformer au prédécesseur du RE2020, il faut ainsi optimiser l’éclairage naturel, poser des fenêtres et des porte de qualité, maximiser les surfaces vitrées orientées nord (au contraire de celles orientées sud), utiliser des matériaux isolants, et en fonction du climat environnant le bien, le construire de manière à avoir le moins possible besoin de climatisation.
Cette obligation de confort a, elle aussi, un indicateur quantitatif permettant de juger objectivement si un bâtiment venant d’être construit la vérifie ou non.
Il s’agit de la température intérieure conventionnelle (TIC). La température intérieure conventionnelle est définie comme la température maximale que peut atteindre l’intérieur d’un logement pour cinq journées consécutives en cas de fortes chaleurs.
Pour que la bâtiment construit soit en accord avec le prédécesseur de la réglementation thermique RE2020 toujours en application, la température intérieure conventionnelle doit être inférieure à la température intérieure conventionnelle de référence ou Ticréf, qui est fixée à 26 degrés Celsius en moyenne.
Afin de réduire sa température intérieure conventionnelle, plusieurs solutions sont possibles.
Premièrement, un constructeur peut augmenter l'inertie du bâtiment. Cela signifie utiliser des matériaux qui augmentent le temps qu’il faudra à la chaleur extérieure et au soleil pour chauffer l’air à l’intérieur du logement. Pour ce faire, il favorise les matériaux lourds comme la pierre et le béton.
Pourquoi cela est-il efficace ? Simplement parce qu’en journée, là où il est, sans climatisation, difficile de refroidir l’intérieur d’un bâtiment, votre bâtiment mettra beaucoup de temps à atteindre la température maximale de la journée.
Quand elle sera atteinte, il sera avec un peu de chance suffisamment tard pour que vous puissiez aérer le logement sans craindre la chaleur de l’air extérieur ou le soleil - gare, cependant, aux moustiques.
Deuxièmement, et c’est notamment ici que réduire la température intérieure conventionnelle peut entrer en contradiction avec la réduction des besoins énergétiques des bâtiments, l’orientation des surfaces vitrées va encore une fois entrer en jeu.
Le problème étant que cette orientation peut difficilement vous être bénéfique à la fois en hiver, quand il s’agit de se chauffer, et en été, là où vous chercherez au contraire à minimiser votre exposition au soleil.
Premièrement, et dans le sillon des réglementations thermiques précédentes, la réglementation environnementale RE2020 a pour but d’aller plus loin dans la baisse de consommation en énergie des bâtiments neufs, notamment concernant l’indicateur Bbio qui décrit les besoins énergétiques de l’habitat indépendamment des systèmes utilisés.
En plus de cela, la RE2020 intègre des critères prenant en considération le coût en carbone de l’énergie utilisée, ce qui favorise les bâtiments utilisant des pompes à chaleur, des réseaux de chaleur, ainsi que la biomasse.
A terme, la réglementation environnementale RE2020 prévoit la fin des chauffages utilisant de l’énergie fossile et de certains chauffages électriques peu efficaces dans les logements neufs.
Deuxièmement, la réglementation environnementale RE2020 prendra en compte les émissions de CO2 pendant la phase-même de construction, ce qui n’était pas le cas avec la réglementation thermique RT2012. Selon le Ministère de la Transition Écologique, 60% à 90% des émissions de CO2 des bâtiments énergétiquement performants (selon les critères de la RT2012) n’ont pas lieu à cause de son utilisation, mais pendant les phases de construction et de démolition. Il est ainsi essentiel de s’attaquer à l’impact environnemental de ces phases, notamment en utilisant des matériaux biosourcés et du bois.
Bon à savoir
Un matériau biosourcé est soit d’origine végétale, soit d’origine animale, et son utilisation permet de diminuer les émissions de CO2, car son empreinte carbone est moindre que celle des matériaux traditionnels qu’il remplace.
Troisièmement, et alors que c’était là aussi déjà un objectif de la réglementation thermique RT2012, les bâtiments créés après la mise en application de la réglementation environnementale RE2020 devront être agréables lors de fortes chaleurs.
En fait, si la RT2012 prenait quelques dispositions à cet égard, les résultats n’étaient pas au rendez-vous et les bâtiments construits en fonction de cette réglementation étaient souvent inconfortables en été.
Pour la première fois depuis la mise en place des réglementations thermiques en 1974, et comme son nom légèrement différent pouvait le laisser deviner, la réglementation environnementale RE2020 va réguler les émissions de gaz à effet de serre dans les bâtiments neufs.
En effet, le coefficient Bbio, que nous avons déjà vu plus haut et qui était déjà utilisé dans le cadre de la RT2012, sera encadré de manière plus stricte. Selon le Ministère de la Transition Écologique, le Bbiomax sera en moyenne 30% inférieure avec la nouvelle réglementation environnementale RE2020. Toujours selon cette source, cet objectif semble atteignable car de nombreux bâtiments construits aujourd’hui respectent en fait déjà ces exigences plus strictes.
Ensuite, la réglementation environnementale RE2020 prévoit la sortie progressive des modes de chauffages utilisant des énergies fossiles dans les bâtiments neufs. Dès 2025, en effet, entrera en vigueur un seuil maximal d’émissions de gaz à effet de serre.
Alors qu’aujourd’hui la plupart des nouveaux bâtiments sont chauffés au gaz, il se trouve que ce mode de chauffage est le pire en matière d’émissions de gaz à effet de serre.
Or, avec le seuil maximal d’émissions fixé par la RE2020 qui est de 4 kg de CO2 par mètre carré et par an, ces systèmes de chauffage à gaz seront exclus des constructions neuves, ce qui aura, a priori, bien pour effet de réduire les émissions de CO2 générées par le secteur du bâtiment en France.
En effet, prenons l’exemple d’une maison de taille moyenne et ayant des caractéristiques standard, construite avant la mise en place de la RE2020 et chauffée au gaz. Si elle avait été soumise à la RE2020, cette maison émettrait 10 fois moins de gaz à effet de serre que dans le cas de la RT2012 !
Les phases de constructions et de démolition des bâtiments sont, du point de vue des d’émissions de gaz à effet de serre, très importantes car elles ont une empreinte carbone élevée. Or, elles ne sont pas encore prises en compte par le prédécesseur de la RE2020.
Cette dernière va ainsi les inclure dans les exigences liées aux nouvelles constructions. Pour cela, elle introduit ce qu’on appelle une analyse de cycle de vie ou ACV des bâtiments en question.
Pour réaliser une analyse de cycle de vie, il faut naturellement estimer l’impact carbone de tous les matériaux utilisés lors de la construction du bien, qui est en partie donné par les fournisseurs. Mais il faut aussi prendre en compte les émissions de CO2 relatives au chantier de construction.
Les exigences de la RE2020 vont en fait encore plus loin en utilisant la méthode de l’analyse de cycle de vie dynamique, selon laquelle il vaut mieux émettre 1 kg de CO2 dans l’atmosphère dans dix ans plutôt qu’immédiatement.
Cette pondération des émissions fait sens puisqu’un kg de CO2 relâché immédiatement de l’atmosphère contribuera, comme il s’agit d’un gaz à effet de serre, à réchauffer l’atmosphère dès maintenant, alors que le kg de CO2 relâché dans 10 ans ne commencera à réchauffer l’atmosphère qu’à cette date - son impact sera ainsi plus limité à moyen terme.
Ainsi, les matériaux biosourcés et géosourcés seront favorisés par la réglementation environnementale RE2020.
Bon à savoir
Un matériau géosourcé est un matériau d’origine minérale qui demande peu de transformation.
Plus précisément, nous pourrions être sur le point d’assister à un tournant dans l’usage du bois dans la construction de logements neufs. Puisque très favorable environnementalement parlant, ce matériau n’est pourtant utilisé pour les ossatures des maisons que dans moins de 10% des cas.
Malgré les exigences du prédécesseur de la réglementation environnementale RE2020 en matière de température intérieure conventionnelle (TIC), de nombreux logements les respectant ne sont pas agréables en été.
Or, selon le Ministère de la Transition Écologique, le nombre d’épisodes de fortes chaleurs va aller en s’intensifiant à cause du réchauffement climatique.
C’est pourquoi, avec la RE2020, l’indicateur Bbio, qui décrit les besoins énergétiques d’un logement, va prendre en compte non seulement les besoins énergétiques liés au chauffage et à d’autres utilisations, comme c’était déjà le cas, mais aussi les besoins énergétiques liées au refroidissement du logement.
Aussi, alors que l’indicateur qui faisait référence jusqu’ici en matière de confort en été, était la TIC, un nouvel indicateur, dont l’unité sera en degrés Celsius.heures ou DH (cela signifie que pour l’obtenir, on devra multiplier une certaine température par un nombre d’heures), sera calculé lors de la construction d’un bâtiment. Son calcul est détaillé ici, et le seuil à ne pas dépasser sera de 1250 DH.
En pratique, ce seuil correspond à un logement dont la température serait de 30 degrés Celsius en journée et de 28 degrés Celsius la nuit pendant 25 jours.
Si le seuil est a priori uniforme dans toute la France, il pourra être modulé en fonction du climat environnant.
Ce seuil de 1250 DH n’est pas le seul qui sera lié au nouvel indicateur. En effet, un autre seuil de 250 DH va être mis en place.
Cependant, ce second seuil n’a pas vocation à être systématiquement respecté. Son objectif est en fait d’inciter tous les constructeurs à réduire le nouvel indicateur, même s’ils respectent le premier seuil.
C’est pour cela que les logements dépassant le seuil de 250 DH auront des pénalités dans le calcul de leur performance énergétique.
Comme la réglementation énergétique RE2020 sera plus contraignante que les réglementations thermiques précédentes, par exemple en ce qui concerne les matériaux utilisés lors de la construction d’un bâtiment, on s’attend à ce que les prix des logements neufs augmentent à partir de l’année prochaine.
Officiellement, ce surcoût est estimé à 10% entre aujourd’hui et 2031. Mais plusieurs facteurs permettent de penser qu’il sera en réalité moindre.
Premièrement, en effet, lorsque la RT2012 a été mise en œuvre, le surcoût estimé de 10% à 15% ne s’est pas matérialisé en pratique car les pratiques du secteur de la construction ont rapidement été adaptées.
Deuxièmement, la réglementation est assez progressive puisque les labels BBC (bâtiment basse consommation) et E+/C- ont préparé l’arrivée de la réglementation environnementale RE2020.
En se basant sur le passé, il est ainsi possible qu’il y ait un petit surcoût des prix de logements neufs dès la mise en place de la RE2020, mais que les surcoûts à moyen et à long terme ne se matérialisent pas.